Les performances récentes du système de recherche et d’innovation de l’Union européenne (UE), comparées à celles des Etats-Unis et de la Chine, laissent entrevoir quelques signes encourageants, mais surtout des signaux d’alarme. Les dépenses de l’UE en matière de recherche et développement (R&D), exprimées en pourcentage du produit intérieur brut, sont encore loin de l’objectif de 3 % qu’elle s’était fixé pour 2010 : elles atteignaient 2 % en 2015 et 2,2 % en 2021, quand les Etats-Unis passaient de 2,8 % à 3,5 %. L’écart s’est creusé, au lieu de se réduire. Par ailleurs, la Chine a fait beaucoup plus de progrès que l’UE, et a même réussi à la dépasser (de 1,9 % à 2,4 %).
Si le déficit de l’UE par rapport aux Etats-Unis ne s’est pas aggravé en matière de R&D financée par le secteur public, ce déficit va croissant en ce qui concerne les dépenses de R&D du secteur privé. L’Europe peut avoir des centres d’excellence en sciences, mais elle réussit généralement moins bien à réaliser de grandes réussites innovantes. Cette situation est parfaitement illustrée dans le domaine de l’intelligence artificielle (IA). Si l’UE est en tête des publications relatives à l’IA par rapport aux Etats-Unis, ce n’est absolument pas le cas pour les brevets liés à l’IA. L’UE a été et continue d’être un nain en la matière : elle détient moins de 5 % de l’ensemble des brevets d’IA dans le monde. La course aux brevets sur ce sujet se déroule entre les Etats-Unis et la Chine, course que la Chine est en train de gagner progressivement : elle détenait deux tiers de ces brevets en 2022.
Le déficit de l’UE en matière de R&D des entreprises est également illustré par la position des entreprises européennes dans le classement mondial des dépenses de R&D privée. Ce classement, qui comprend 2 500 entreprises, est dominé par les firmes américaines. Et, au fil du temps, l’UE continue à perdre du terrain, alors que les Etats-Unis et la Chine gagnent des places ; alors qu’en 2017, les entreprises chinoises étaient aussi nombreuses que les européennes dans ce classement, elles étaient deux fois plus nombreuses en 2022, tout comme le sont toujours les entreprises américaines.
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